Conciliation vie professionnelle et vie d’aidants : les travaux de la Macif

Conciliation vie professionnelle et vie d’aidants : les travaux de la Macif

Un fait de société peu pris en compte

En France, on compte aujourd’hui 11 millions[1] d’aidants. Ils accompagnent une personne âgée, en situation de handicap, ou atteinte d’une maladie chronique ou invalidante.

Les aidants sont en moyenne âgés de plus de 50 ans, et plus de la moitié sont des femmes. Ils prennent soin d’un conjoint, d’un parent, d’un ami, d’un enfant. Le volume d’aide est variable en fonction du niveau de dépendance de la personne aidée : il peut aller de 1 à 9h par jour. Il apparait également que la charge est plus élevée si l’aidant réside dans le même domicile que son proche.

On trouve les aidants dans toutes les catégories socio-professionnelles. Il n’y a pas de profil type, et au vu des éléments cités ci-dessus, on imagine très bien que leurs besoins sont nombreux.

Environ 4 millions d’actifs sont concernés par l’aide d’une personne dépendante. Cela demande de pouvoir adapter son emploi du temps professionnel, de s’absenter pour accompagner son proche à des rendez-vous médicaux si nécessaire, mais cela signifie également que lorsque l’aidant est au travail, il doit pouvoir être joignable en cas d’urgence.

Cela a forcément une incidence sur l’implication de l’aidant dans son travail, mais si les employeurs prennent en compte sa situation, l’aidant peut conserver son emploi et participer autant que les autres salariés à la productivité de son entreprise ou de son service.

Les enquêtes de la Macif

C’est en 2012 que la Macif a commencé à travailler sur la question des aidants salariés, à l’occasion d’un projet européen mené conjointement avec la Ligue des Droits de l’Homme et le CNRS[2]. La première étape consistait à chercher les bonnes pratiques destinées aux aidants dans les entreprises et institutions dans plusieurs pays, l’objectif étant de s’en inspirer et de proposer aux entreprises françaises de les mettre en place.

Cette étude a certes mis en exergue des accords internes favorisant le télétravail, la flexibilité des horaires, des services d’assistantes sociales dédiées pour mieux accompagner les aidants, mais elle a surtout révélé que les aidants eux-mêmes devaient trouver des moyens « détournés » de concilier leur vie professionnelle et leur vie personnelle.

C’est pourquoi en 2014, une vaste enquête a été lancée sur cette thématique de la conciliation. Menée en partenariat entre la Macif, les chercheurs de l’université Paris Descartes et l’Union Nationale des Associations Familiales (UNAF), elle a été faite sous la forme d’un questionnaire en ligne ouvert à tous les aidants.

Cette enquête a permis de comprendre qu’il y avait de réels manques dans les dispositifs proposés. Les congés de solidarité familiale, de présence parentale, plus récemment le congé de proche aidant ou la loi Mathys (qui autorise le don de RTT entre collègues) ont le mérite d’exister, mais les congés proposés ne sont pas rémunérés ou juste indemnisés[3] et occasionnent des pertes financières qui peuvent ajouter des difficultés supplémentaires à des situations qui sont déjà parfois complexes.

Toutefois, cette enquête a également révélé que continuer de travailler était une réelle source d’équilibre pour les aidants. Cela permet de ne pas être complètement absorbé par l’aide apportée à son proche, cela procure de l’indépendance et permet à l’aidant de conserver son « identité » en dehors de la relation d‘aide.

On y a également appris que les aidants prennent sur eux, car l’aide reste tout de même un frein pour leur carrière, les évolutions de statuts ou de salaire. Afin de ne pas être pénalisés financièrement, les aidants utilisent des RTT, des congés et même des arrêts de travail.

On sait aussi que près de la moitié n’ont pas informé leurs collègues ou leur hiérarchie de leur situation, ce qui peut évidemment venir compliquer les relations professionnelles, induire des jalousies, ou une mauvaise perception de l’aidant qui est souvent absent, en retard ou au téléphone pendant ses heures de travail.

Enfin, cette enquête a révélé que les personnes qui aident un enfant en situation de handicap ont plus de facilité à parler de leur situation que les personnes qui aident un proche âgé ou malade. Il y a donc une inégalité dans la manière de percevoir une relation d’aide. Peut être que les collègues font preuve de plus d’empathie quand il s’agit d’un enfant que pour une dépendance liée à l’âge.

Un Guide pratique destiné aux salariés aidants

Au vu de l’évolution démographique, on peut réellement s’attendre à ce que chacun d’entre nous puisse un jour être concerné par l’accompagnement d’un proche dépendant. Par ailleurs, 79 % des personnes interrogées ont des difficultés à concilier vie professionnelle et activité d’aidant, 72 % considèrent que leur rôle a une incidence négative sur leur concentration et leur efficacité, et 44 % posent régulièrement des jours de RTT et de congés pour aider leurs proches dépendants.[4]

C’est pourquoi la Macif a créé des outils destinés au grand public, comme le guide « Être aidant et travailler » (édité en 2017) qui recense tous les dispositifs destinés aux aidants actifs, quelle que soit le type de dépendance de leur proche. Ce guide permet également de connaitre les solutions de répit, et les interlocuteurs à solliciter en fonction du besoin.

Ce document et ces enquêtes servent de base pour animer un certain nombre de conférences, à l’occasion de Salons dédiés aux aidants ou au handicap, mais également lors de petits déjeuners en entreprises (destinés aux managers, RH etc.) ou d’ateliers de sensibilisation réalisés lors de congrès ou de rencontres thématiques sur les territoires.

Ce travail sur la conciliation entre vie professionnelle et aide est nécessaire. Permettre à un aidant de conserver son emploi, c’est lui assurer de conserver un revenu, mais aussi un lien social.


[1] BVA pour APRIL 2015

[2] Être aidant informel et travailler, sans être discriminé

[3] Le congé de proche aidant n’est pas rémunéré, le congé de présence parentale donne droit à une Allocation Journalière de Présence Parentale versée par la CAF, et le congé de solidarité familiale à une allocation journalière d’accompagnement d’un proche en fin de vie versée par la CPAM. Source : Guide à destination des entreprises sur les aidants familiaux et proches aidants, ORSE/UNAF, mise à jour 2017.

[4] Source : Enquête sur les actifs soutenant un membre de leur entourage atteint de la maladie d’Alzheimer, F.Alzheimer, sept 2016